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Dans les yeux de Josette Peltier - Première Atelier Tailleur pour la Maison CHANEL

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Une sensation de grand silence blanc et doux. De concentration tout en rondeur. Un jupon d’organza semble flotter sur une table, douze mètres de tissu, et pourtant, on dirait un nuage. Pareilles à des engageantes d’une chemise à la Reine, deux manches de mousseline s’échappent d’une veste de tailleur. Ici, même la ligne est souple, les épaules dessinent une courbe, le tweed est souvent posé sur un double tulle, pour lui donner encore plus de légèreté.  

 

Si le bouton a servi de trame au film écrit et réalisé par Dave Free pour Chanel, ceux qu’on voit ici évoquent des perles d’eau scintillante. Tulle de soie, tulle tutu, tulle illusion, macramé strassé, paillettes, petits points invisibles. Le thème de la saison, c’est la danse, une chorégraphie tissée de ballerines en apesanteur. Les vestes se métamorphosent en cache-cœur, un galon à la taille. Un moulage de guipure est réalisé sur une carcasse d’organza, la robe exige à elle seule 200 heures de travail. Un manteau d’organza plissé scintille de filets d’argent brodé. 

 

Nous sommes dans l’atelier Tailleur de Madame Josette, entrée dans la maison Chanel en mai 2008, après vingt ans au Flou chez Yves Saint Laurent avec Madame Catherine, puis Madame Georgette, cinq ans chez Alaïa avec la même Madame Georgette, et un passage éclair chez Gaultier Paris. C’est en 2012 qu’elle est devenue Première d’Atelier, en charge notamment de toutes les commandes en Asie. Jusqu’en 2020, Madame Josette allait ainsi une fois par mois en Chine. « Pendant le confinement, on a travaillé en visio, j’ai même formé à distance des retoucheurs qui nous renvoyaient les modèles pour qu’on puisse les corriger… » Les commandes ne cessent de se multiplier. « Je travaille avec le miroir. Il faut avoir l’œil du photographe, et cela, je le dois à Karl Lagerfeld. »

 

Ce qui a changé depuis ses débuts dans le métier ? « On est toujours là pour l’excellence, mais sans la rigidité. Le savoir-faire et le savoir être forment un tout. » Et d’ajouter : «  Cet atelier, je veux l’agrandir par forcément en nombre, mais de manière qualitative. Pour qu’à mon départ, mes Secondes soient sereines. » 

 

Une question d’épingles, de règles, de calcul des proportions, de sens et de hauteur. Mais également de confiance et de maîtrise qui rend possible l’inattendu. « Même si tout est une question de millimètres, il faut laisser la création aller vers le hasard. » Avec Virginie Viard, « il faut être à l’écoute d’un geste, d’un regard. En haute couture, les silences s’écoutent. »