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Dans les yeux de Danielle Cillien Sabatier

Interviews

« Le livre de mode est un objet autant qu'un contenu et il doit séduire à l'image des créateurs qu'il représente. »

Directrice Générale de la Librairie Galignani, librairie historique installée au 224 rue de Rivoli, depuis 1856, elle a largement contribué à faire de ce lieu un rendez-vous cosmopolite prisé par tous les amateurs de beaux livres, et notamment de publications liées à la mode. Rencontre avec une passionnée.

 

Que représente l’activité livres de mode au sein de la librairie Galignani ?

La partie Mode a toujours été très importante dans la librairie, en français comme en anglais, livres de photos, défilés, biographies des couturiers, histoire du secteur, ouvrages sur les textiles, monographies des différentes maisons de couture, catalogues d'expositions, c'est un sujet central pour nous et nous proposons environ 5000 références sur le secteur.

 

Comment les présentez-vous ?

Nous les mettons régulièrement en scène selon l'actualité, en particulier pendant les Fashion Weeks, faisons des vitrines thématiques, et bien sûr leur consacrons tout un espace qui est au cœur du rayon Beaux-Arts. La semaine prochaine, nous faisons un high-light sur Diane von Fürstenberg pour la sortie de son livre Women before Fashion, ensuite nous mettrons en scène l'amitié de Christian Dior et Christian Bérard pour le livre qui sortira chez Gallimard, Dior Bérard, la mélancolie joyeuse. Nous avons fait beaucoup de vitrines très spectaculaires en mode.

 

Quels changements notez-vous depuis ces dernières années ?

On note une production plus importante sur des sujets patrimoniaux ou historiques, des expositions thématiques ou des mises en perspective, alors que précédemment on nous demandait plus de livres photos sur un créateur et ses défilés ou ses créations. Beaucoup de grands couturiers ayant disparu, les expositions, les biographies ou tout simplement les livres présentant l'ensemble de leur œuvre se sont développés. Je pourrais citer les livres sur Pierre Cardin (Flammarion), Yves Saint Laurent (Assouline ou la Fondation YSL)  ou la série sur Dior selon les différents créateurs de la maison (chez Assouline) ou les multiples biographies sur Karl Lagerfeld (Flammarion, La Martinière, Thames & Hudson) ou encore l'excellente série Fashion Eye aux Editions Louis Vuitton qui propose souvent les archives Mode d'un photographe extraordinaire, comme Jean-Loup Sieff, Slim Aarons, Helmut Newton, Peter Lindbergh ou Saul Leiter.

 

Le public a-t-il évolué ?

Oui, on constate un vrai rajeunissement du public avec un très fort engouement des jeunes pour la mode, notamment grâce aux Pass Culture souvent consacrés chez nous à la collection Défilés/Catwalks (la Martinière /Thames & Hudson) et la forte propension de jeunes qui s'intéresse à l'activité du secteur.

 

Quels sont les livres qui ont marqué les dernières saisons ?

Le livre sur Pierre Cardin, mythe, mode et modernité de Jean-Pascal Hesse, la biographie de Karl Lagerfeld par Marie Ottavi, la biographie d'Anna Wintour en français et en anglais, les séries Défilés notamment pour Chanel, Yves Saint Laurent et puis les spectaculaires monographies d'Assouline sur Dior sur les différents couturiers de la maison (on est au 6e avec Raf Simons).

 

Votre A list de la saison ?

J'attends avec impatience le livre sur Dior et Bérard par Laurence Benaïm, à paraître chez Gallimard, début octobre, ainsi que la biographie de Ralph Lauren par Jérôme Kagan chez Séguier, et en beaux livres, il y aura le catalogue de l'exposition Chanel au V&A de Londres ainsi que le Défilés consacré à Givenchy et dans la collection Fashion Eye, je vous recommande Hong Kong par Frank Horvat et Deauville par Omar Victor Diop.

 

Quels conseils donneriez-vous aux éditeurs ?

Je leur dirai de continuer à faire des éditions étonnantes dans la forme, originales par leur design et à ne pas hésiter à utiliser des matériaux originaux et spectaculaires. Le livre de mode est un objet autant qu'un contenu et il doit séduire à l'image des créateurs qu'il représente.

 

Karl Lagerfeld venait trois fois par semaine chez Galignani, quel souvenir gardez-vous de ses passages ?

Ce fût une chance extraordinaire d'avoir pu travailler pour un esprit vif-argent, un homme de Haute Culture avant tout. Tous les libraires de Galignani qui ont recherché les livres pour lui au quotidien, l'exceptionnelle collection que vous pouvez contempler dans son studio, restent profondément marqués par ce "Zeitgeist" et il reste très présent pour nous. Nous l'adorions.